Guide de la sobriété foncière en Île-de-France

Comment développer hameaux, villages et bourgs tout en limitant l’artificialisation des sols ?

29 septembre 2022ContactValérian Coince (Safer de l'Île-de-France), Julie Veysseyre (Safer de l'Île-de-France), Jean Bénet

Alors qu’ils sont une ressource finie et non renouvelable, hôtes de la biodiversité et participent à la régulation du climat, les sols ont longtemps été considérés comme le simple support de nos activités humaines et de nos bâtiments.
Cette appréhension du sol comme un potentiel « à exploiter » a poussé à une consommation toujours plus grande d’espaces naturels, agricoles et forestiers à mesure que les espaces urbanisés se sont développés au XXe siècle. Pourtant, les sols remplissent des fonctions bioclimatiques essentielles indispensables à la protection de la biodiversité, à la résilience alimentaire, au bien-être, à l’adaptation et à l’atténuation du changement climatique.
Pendant longtemps, cette consommation excessive des sols, parfois décorrélée de la croissance démographique et économique, n’a pas été suffisamment régulée. Compte tenu de l’urgence climatique et écologique, un changement de paradigme s’avère aujourd’hui nécessaire dans les politiques d’aménagement du territoire : les collectivités territoriales se situent en première ligne pour amorcer cette transition, qui se traduit par la mise en place progressive de l’objectif « Zéro Artificialisation Net ».

Ce guide, réalisé par L'Institut Paris Region et la Safer de l'Île-de-France, s’adresse aux communes rurales et entend donner de premières pistes opérationnelles afin de bâtir à l’échelon des communes et intercommunalités des stratégies de sobriété foncière.

Définir les termes et les enjeux de l’artificialisation pour se doter d’outils d’observation

Si la consommation d’espace renvoie à une approche binaire distinguant les espaces urbanisés des espaces naturels, agricoles et forestiers, l’artificialisation est une notion plus fine qui s’intéresse à la fonctionnalité des sols, et « en particulier de ses fonctions biologiques, hydriques et climatiques, ainsi que de son potentiel agronomique ». A la lutte contre l’étalement urbain et ses impacts environnementaux et socio-économiques s’ajoute désormais la lutte pour la préservation et la restauration des services écosystémiques rendus par les sols et indispensables à la résilience des territoires (habitat pour la biodiversité, production alimentaire, séquestration du carbone, infiltration des eaux, qualité de vie, fourniture de matériaux, etc.).


 

Ce changement de paradigme dans la gestion des sol et l’aménagement du territoire a conduit à l’affirmation d’un objectif de « Zéro Artificialisation Nette » en 2050, soit l’équilibre entre les flux de surfaces nouvellement artificialisées et les flux de surfaces renaturées. En l’attente d’outils s’observations permettant d’appréhender finement ce processus, un premier pallier intermédiaire impose une réduction de la consommation d’espace d’ici à 2031.
Afin d’observer la consommation d’espace, les communes disposent en Île-de-France de 2 sources complémentaires : les fichiers fonciers, qui présentent l’avantage de la simplicité, mais présentent plusieurs biais d’observation, et le Mode d’Occupation des Sols, source historique fournissant d’importantes capacités d’analyse tant sur l’état du territoire que sur ses processus de transformation.

Requestionner les besoins de son territoire et mener un diagnostic intégrant la qualité des sols

Avant toute chose, faire preuve de sobriété foncière nécessite de requestionner les besoins du territoire (en logements, en équipements, en foncier d’activité) pour un dimensionnement au plus juste. Il s’agit ensuite de qualifier les enjeux écologiques et gisements de mon territoire afin de mobiliser en priorité le renouvellement urbain et d’éviter d’impacter les sols les plus précieux ou les plus vulnérable par de nouveaux projets. 

Des outils pour maîtriser l’urbanisation

La PLUi est le principal outil à la disposition des communes pour mettre en œuvre la sobriété foncière : il permet à la fois d’encourager le renouvellement urbain et de préserver les ENAF. De nombreux outils réglementaires sont mobilisables : gestion de la densité, des hauteurs, règles d’implantations et de stationnement permettant de produire des formes urbaines compacts, protection des espaces naturels, agricoles et forestiers et de la trame verte et bleue urbaine. 
Des outils plus solides et pérennes dans le temps peuvent également être mobilisés pour préserver les ENAF sur le long terme : ZAP, PEAN, ZPNAF, outils de protection du patrimoine et des milieux naturels … Plus globalement, une profonde réflexion est à engager pour animer et valoriser les espaces et activités agricoles, affirmer leur rôle dans le développement économique et durable du territoire et recréer le lien de la fourche à l’assiette : cela peut passer par un Projet Alimentaire de Territoire, par le soutien à des pôles agricoles de proximité ou encore par de l’animation (programme européen LEADER, programme Agriurbain).

Éviter, Réduire et Compenser l’artificialisation et ses impacts, un cadre pour mettre les sols au cœur de l’aménagement

Une application fidèle de la séquence « Eviter, Réduire, et Compenser » à la problématique de l’artificialisation offre une approche holistique des leviers de la sobriété foncière et du respect des sols dans l’aménagement. L’Évitement intervient quand aucun nouvel espace n’est artificialisé, par la remobilisation des espaces vacants ou sous occupés, la rénovation, réhabilitation ou encore la surélévation de bâtiments existants. On parle de Réduction quand l’artificialisation est diminuée (travail sur la densité et la compacité des formes urbaines produites), et ses impacts jugulés (préservation des espaces NAF les plus précieux, évitement des espaces ouverts urbains indispensables à la trame verte et bleue et au bien-être des populations, mise en place de principes de construction durable comme la gestion intégrée des eaux pluviales ou la végétalisation du bâti). Enfin, la Compensation, porteuse d’incertitudes financières et techniques ne permettant la plupart du temps pas de contrebalancer les impacts de l’artificialisation, est davantage à envisager comme un moyen de restaurer des sols dégradés là où les bénéfices sont les plus importants : résorption d’une coupure sur une continuité écologique, création d’îlots de fraîcheurs, de jardins de pluies ou encore de parcs dans des zones carencées...

Cette étude est reliée aux catégories suivantes :
Aménagement et territoires | Foncier | Développement durable | Planification | Planification territoriale | Sobriété énergétique

Études apparentées